Pourquoi prendre le Cash-Flow comme indicateur principal ?

Quel est le statut du Cash-Flow actuellement dans les entreprises ? S’agit-il uniquement de s’interroger ici sur les modalités de maîtrise de sa trésorerie, qui sont si importantes surtout dans le contexte actuel de crise sanitaire, ou bien et en même temps de tenter de comprendre pourquoi il tend à prendre la place des taux de rentabilité et de profitabilité ? 

Traditionnellement la mesure du flux de trésorerie s’effectue au moyen de la différence entre encaissements et  décaissements, ce qui constitue un état hebdomadaire de la liquidité d’une entreprise, autrement dit sa capacité à respecter ses obligations à court terme, mais pour autant n’indique pas en quoi cette entreprise est rentable, donc génératrice de bénéfice. C’est dire que les deux analyses sont la plupart du temps distinctes l’une de l’autre.

Or, le Free Cash-Flow est devenu depuis quelques années de l’indicateur principal des entreprises. Quelles en sont les raisons ? 

La première, tenant à la financiarisation croissante des entreprises, privilégie un indicateur constitué par l’excédent net de trésorerie après financement des investissements d’exploitation et de la distribution des dividendes. Le Free Cash-Flow mesure donc l’excédent dégagé par l’entreprise qui serait mis à la disposition des investissements ou du désendettement.

La seconde raison tient à ce que les entreprises ont de plus en plus tendance à se projeter dans l’avenir et donc se focalisent sur ce qu’une entreprise peut rapporter, générer de flux de trésorerie, et non sur ce qu’elle possède, autrement dit la valeur de ses actifs. En d’autres termes, le Free Cash-Flow constitue le véritable générateur de la valorisation potentielle des actifs d’une entreprise, autrement dit de la valorisation d’une entreprise.

Comment mesurer le Free Cash-Flow ?

Son calcul se décompose en trois étapes.

Première étape : Le Cash-Flow opérationnel s’établit de la manière suivante :

Excédent Brut d’Exploitation (EBE) – Dotation aux amortissements – Dotation aux provisions +/- Variations du besoin en Fonds de Roulement (BFR), selon que celui-ci est négatif ou positif.

Le Cash-Flow opérationnel prend donc en compte sur une année l’ensemble des coûts internes et externes (achats) ainsi que les variations en termes de délais de paiement des clients, des fournisseurs, et celles des stocks.

Seconde étape : Le Cash-Flow d’investissement s’obtient en déduisant les acquisitions aux cessions d’immobilisation, autrement dit le flux de liquidités générées par les opérations sur les investissements. 

Troisième étape : Le Cash-Flow de Financement mesure le flux de liquidités par l’addition des augmentations de capital et des emprunts à moyen et long terme, à laquelle on soustrait les dividendes versés aux actionnaires. Le Cash-Flow de Financement constitue la mesure du besoin de financement, qu’il soit négatif ou positif à la fois des OPEX et des CAPEX.

Comment Piloter le Free Cash-Flow ?

Du fait que les entreprises sont de plus en plus confrontées à des situations et un environnement de moins en moins prévisibles (imprévisibilité augmentée par la crise sanitaire), elles sont en prise avec des décalages entre les flux de trésorerie prévus et ceux réels. Autant dire qu’il est préférable de piloter le Free cash-Flow plutôt que de le mesurer. En réalité, dans la plupart des cas, les entreprises ne pilotent pas leurs flux de trésorerie, mais sont en permanence en situation de réactivité vis-à-vis de leur environnement. Elles ont donc tendance à raisonner en termes de réduction entre les délais de paiement clients et ceux aux fournisseurs. Étant donné que la plupart des entreprises font exactement ou à peu près les mêmes choses, la question de ces décalages resurgit fréquemment.

Or, piloter son Free cash-Flow revient à réduire le besoin de financement de son entreprise, comme nous le montre le schéma suivant.

Le Besoin de financement d’une entreprise est d’autant plus important que les cycles d’exploitation et de paiement clients ont une durée excédant largement les cycles fournisseurs. Durant ces cycles, l’entreprise fait l’avance de la Valeur Ajoutée créée, car les fournisseurs font l’avance des coûts d’achat pour partie de ce temps.

En conséquence, deux leviers peuvent permettre de piloter le Cash-Flow Opérationnel :

  • Le premier consiste dans les actions à mener en vue de réduire fortement les cycles d’exploitation (approvisionnement, production, Supply Chain). Ce qui correspond aux pratiques d’accélération des flux que nous avions développé lors de l’article précédent (lien en bas d'article)
  • Le second, réside dans la mise en place d’une souscription d’abonnements visant à réduire pour partie les délais de paiement des clients. Les souscriptions d’abonnement consistent à offrir un service Premium aux clients qui s’engagent en contrepartie d’un prélèvement mensuel (sur l’exemple des GAFAM). Ce qui réduit les délais de paiement clients par rapport à la base des 45 jours légaux.

Conclusion

Ces deux actions ont pour conséquence de dynamiser la formule de calcul du Cash-Flow = EBE +/- BFR, qui constitue une mesure statique et non un instrument, un outil de pilotage.

Passer de la mesure au pilotage du Cash-Flow Opérationnel consiste à accroitre le taux de rotation de l’EBE au cours de l’année par une réduction du BFR.

D’où cette proposition de la formule du pilotage du Cash-Flow Opérationnel :

Ratio du Pilotage du Cash-Flow = EBE/Cycle de financement*

*En nombre de jours

Autrement dit, il s’agit de savoir en combien de jours une entreprise récupère son EBE, ce qui se traduit par une croissance de ce ratio et donc un EBE beaucoup plus important en fin d’année face un BFR réduit, du fait des actions mises en place sur les cycles opérationnels et les cycles de paiement clients.

Lien vers le premier article sur cette thématique ci-dessous